samedi 16 février 2008

Grandis un peu, il faut relativiser, il y a des choses plus graves, etc...

Pendant treize ans j'ai eu la plus adorable de toutes les chiennes colley du monde. Les gens nous arrêtaient dans la rue pour la caresser ou la regardaient en souriant tellement elle respirait la douceur. Elle avait du charme. Elle était discrète et bien élevée, savait se faire aimer même de ceux qui ont horreur des chiens. Elle se couchait en croisant les pattes comme une lady, et même après s'être roulée dans du fumier ou dans Dieu sait quoi de parfumé elle gardait une allure d'aristocrate.

Durant toutes ces années elle a passé plus de temps auprès de moi que n'importe quel humain de ma connaissance. Elle m'a regardée partir le matin à la fac, elle a aimé mes petits copains et le pub où je passais mes soirées, elle a traversé des frontières sur la banquette arrière de voitures, elle a adopté mon mari, les chats et les portées de chatons, et accepté nombre de déménagements sans broncher. Heureuse simplement parce qu'elle était avec moi.


Il y a un an, alors qu'elle était dans ce qu'on suppose être sa quinzième année, il est devenu évident que ce n'était plus une crise mais la fin. Il fallait "prendre une décision", comme font les adultes. Le rendez-vous chez le vétérinaire a été fixé à ce jour-là, le 16, un vendredi. Parce que je voulais avoir un peu de temps avant de retourner au boulot. Je n'arrivais pas à imaginer la vie après.

J'avais toujours eu beaucoup de mépris pour les gens qui conservaient des urnes funéraires chez eux. Eh, c'est la mort, il faut tirer un trait! Si c'était les cendres d'un humain je trouvais ça cinglé et morbide. Si c'était celles d'un animal je trouvais ça cinglé et ridicule.

Mais laisser son corps être jeté dans un container à déchets n'était juste pas envisageable. Quand à l'enterrer en forêt ou dans un cimetière pour animaux, je ne voulais pas en entendre parler. L'idée qu'elle soit loin de moi, et seule, m'était insupportable.
Alors aujourd'hui j'ai les cendres de ma chienne chez moi. Je suis peut-être cinglée, selon mes propres critères, mais c'est une petite consolation de me dire qu'elle est toujours avec moi.
Qui a parlé de tirer un trait?

J'ai accepté l'idée d'avoir eu un chien, accepté que c'était du passé et que je ne pourrai jamais rien changer à ça. Mais la douleur de sa perte est encore bien plus forte que tous les bons souvenirs.

Depuis j'ai découvert une facette nouvelle chez certains humains, parmi ceux qui ont connu ma chienne. Plusieurs ont les yeux dans le vague et la voix qui soupire quand ils l'évoquent. Ca me touche. Ils doivent avoir un petit côté "pas très net" eux aussi.
Comme disent les Allemands, on n'a pas toutes les tasses dans le placard.

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